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Dénonciation du salarié ou conducteur en infraction routière : le vrai et le faux

Radar fixe © H.R. / MFI ECO Radar fixe

Le très controversé article L121-6 du Code de la route, objet d’une nouvelle question prioritaire de constitutionnalité (QPC) auprès de la Cour de cassation1, n’a pas fini de faire l’actualité !

Mais une actualité quelque peu cacophonique, où le vrai côtoie l’imprécis, si ce n’est le faux. Avec les risques que cela implique pour les uns et une inutile inquiétude pour les autres.

Qui est réellement concerné ? Quelles sont précisément les sanctions ? Que faire en pratique ? Dans quelle mesure peut-on contester ?

Dans l’attente de la prochaine décision de la haute cour, et d’un éventuel renvoi devant le Conseil constitutionnel, il paraît utile de faire le point. Concrètement.

L’apparition de nombreux sujets et commentaires enflammés, mais clairement erronés, invite à rappeler la teneur exacte de cet article : 

« Lorsqu'une infraction constatée selon les modalités prévues à l'article L. 130-9 a été commise avec un véhicule dont le titulaire du certificat d'immatriculation est une personne morale ou qui est détenu par une personne morale, le représentant légal de cette personne morale doit indiquer, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou de façon dématérialisée, selon des modalités précisées par arrêté, dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l'envoi ou de la remise de l'avis de contravention, à l'autorité mentionnée sur cet avis, l'identité et l'adresse de la personne physique qui conduisait ce véhicule, à moins qu'il n'établisse l'existence d'un vol, d'une usurpation de plaque d'immatriculation ou de tout autre événement de force majeure. 

Le fait de contrevenir au présent article est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. »

En premier lieu, le dispositif de l’article L. 130-9 a exclusivementpour objet les constatations [d’infractions] effectuées « par ou à partir d’appareils de contrôle automatique »2.

Les personnes physiques et les professionnels en nom propre ne sont pas concernés

Le texte est parfaitement clair sur ce point : pour se voir appliquer les dispositions de l’article L121-6,le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule doit être une personne morale, de droit public ou de droit privé, c’est-à-dire une administration, une société, une association, un GIE, etc. Et, peut-être faut-il le rappeler, la loi pénale est d’interprétation stricte3.

Les personnes physiques, entrepreneurs individuels, commerçants, artisans, professionnels libéraux, microentrepreneurs exerçant en nom propre ne sont donc absolument pas concernés par ce texte, contrairement à ce qu’on a pu lire dans certains titres de presse et autres blogs.

Pour la bonne et simple raison que ces derniers ne sont pas des « personnes morales » !

Et lire des affirmations du genre, par exemple : 

  • « Cette obligation de désignation — de dénonciation, diront les mauvaises langues — s'applique à tous les chefs d'entreprise, y compris à ceux qui n'emploient aucun salarié. »4
  • « Afin de lutter contre l’insécurité routière, le Législateur a mis en place un dispositif obligeant les entreprisesà révéler l’identité de l’auteur de l’infraction au Code de la route. »5,

ce qui est totalement faux, ne peut que laisser très perplexe, quand on sait que près de la moitié des entreprises, soit 2,5 millions d’entre elles, sont individuelleset non des personnes morales ! 

Mais le bouquet est atteint lorsqu’on lit, écrit par un… avocat et une (son ?) élève avocat : « … un article L.121-6 du Code de la route qui impose à l’employeur, titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule (« carte grise »), de dénoncer le salarié conducteur en cas d’infraction routière. »6. Or cet article n’impose nullement aux employeursde dénoncer qui que ce soit ! On peut craindre le pire pour l’élève…

Ou, encore : «  Infractions routières : obligation pour les employeurs de dénoncer leurs salariés à compter du 1er janvier 2017 », titre tonitruant d’un autre avocat, tout aussi faux7 !

À ce niveau, il ne s’agit plus de simples abus de langage, mais de fausse informationou d’incompétence.

Il convient donc de rétablir la vérité : seules, les personnes morales sont concernées par l’article L.121-6 du Code de la route, qu’il suffit de… lire.

Henri RIUS

 

Article publié avec l'aimable autorisation de Média-France.Info (MFI ECO)

1 Saisine du 5 avril 2018, J 18-90.010, K 18-90.011 - Tribunal de police de Paris, 26 mars 2018
2 Les « radars » automatiques, notamment.

Code pénal - Article 111-4
Challenges – Article : Excès de vitesse: pourquoi le PV à 90 euros coûte 540 euros aux travailleurs indépendantspar Eric Bergerolle, avec une remarquable insistance dans l’erreur, gras y compris…

Editions Tissot – Article :Dénonciation du salarié qui a commis des infractions routières : dispositif conforme à la Constitutionpar la Rédaction. Guère mieux avec un très général «  les entreprises » bien appuyé…
Village de la justice – Article : Obligation pour l’employeur de dénoncer les infractions routières de ses salariés : comment ça marche ?par Frédéric Chhum, Avocat, et Marilou Ollivier, Elève-Avocat.
Village de la justice – Article : «  Infractions routières : obligation pour les employeurs de dénoncer leurs salariés à compter du 1er janvier 2017 » par Jean-Christophe Basson-Larbi, Avocat. 

Dernière modification lejeudi, 19 avril 2018 17:27

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