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Licenciement pour faute grave : mise à pied non nécessaire

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Selon une constante jurisprudence, la faute grave est définie comme celle résultant de tout fait (ou ensemble de faits), imputable au(à la) salarié(e), constituant une violation des obligations figurant dans son contrat ou inhérentes à ses fonctions d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du(de la) salarié(e) dans l'entreprise et empêche la poursuite du contrat de travail.

La Cour de cassation vient de lever une incertitude relative à la mise à pied conservatoire généralement prononcée immédiatement par l'employeur en pareil cas.

La faute grave

Bien entendu, il ne peut s'agir que de faits non déjà sanctionnés et non prescrits. La gravité de la faute étant appréciée intuitu personæ : un comportement fautif est susceptible d'être considéré différemment selon les circonstances et les personnes concernées.

La faute grave n’est pas obligatoirement intentionnelle ou caractérisée par une intention de nuire, comme dans le cas de la faute lourde. Il peut s'agir de l’incapacité fautive du salarié à exécuter son travail sans erreurs, celles-ci étant d'une gravité certaine.

L'existence d'un préjudice pour l'employeur n'est pas, non plus, nécessaire à la qualification.

Les exemples sont nombreux : violences, injures, insubordination, abandon de poste, absences fréquentes, non justifiées, retards récurrents, vols, etc.

Sanction

La sanction principale est le licenciement, à laquelle s'ajoute la perte de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité de préavis.

Dans le respect des délais légaux, elle doit intervenir rapidement sous peine de disqualification.

Le plus souvent, l'employeur prononce une mise à pied conservatoire (qui n'est pas une sanction disciplinaire) de sorte à éloigner le(la) salarié(e) de l'entreprise afin de parer à des situations de danger ou désordres supplémentaires.

La question s'est posée de savoir si la mise à pied conservatoire est une condition du licenciement pour faute grave.

L'arrêt de la Cour de cassation du 9 février 2022

En l'espèce, un chef d'équipe d'une société A, M. [G] a adopté sur les chantiers du principal client de son employeur, la société B, un comportement insolent, insubordonné, non professionnel, accumulant les retards, la mauvaise gestion de ses équipes et des plannings, méconnaissant volontairement les directives du client en mettant en danger ses équipes, tenant des propos déplacés et refusant les missions complémentaires, qui a conduit ce client, au cours d'un entretien avec le gérant de la société A, à retirer à celle-ci le marché de maintenance sur lequel M. [G] était intervenu; par ailleurs M. [G] avait,également adopté à l'égard de son supérieur hiérarchique M. [R] un comportement "véhément, agressif et menaçant" à la suite d'un autre refus de prestation chez un client. Faits, survenus principalement entre les 19 et 26 octobre 2016, dont la cour d'appel a constaté qu'ils étaient établis et de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Convoqué le 27 octobre 2016 à un entretien préalable à son licenciement pour motif disciplinaire et licencié pour faute grave le 14 novembre suivant, M. [G] a continué à travailler au sein de la société sans que soit formalisée la moindre mise en garde ou le moindre avertissement, ce sur quoi M. [G] a fondé son recours en contestation de son licenciement pour faute grave.

Débouté devant la juridiction prud'homale, M. [G] obtient gain de cause devant la Cour d'appel qui a retenu, pour écarter la qualification de faute grave, que le salarié avait en effet "continué à travailler au sein de la société sans que soit formalisée la moindre mise en garde ou le moindre avertissement " pendant la procédure de licenciement.

Ainsi, selon la Cour d'appel, M. [G] aurait dû être écarté de l'entreprise (par mise à pied conservatoire) durant la procédure ou, au moins, avoir été l'objet de mise en garde ou avertissement formalisé. Pour cette cour d'appel, le maintien de M. [G] en entreprise durant la procédure signifie que le comportement fautif de M. [G] n'a pas été un obstacle... à la poursuite du contrat de travail.

Une analyse très restrictive rejetée par la Cour de cassation dans son arrêt(1) : l'employeur n'est pas tenu de procéder à une mise à pied conservatoire avant d'engager une procédure disciplinaire.

En pratique

Il est toutefois préférable de prononcer la mise à pied conservatoire à la fois pour des raisons matérielles de sécurité pour l'employeur (dégradations, piratages, vols, violences, etc. durant la procédure) et pour parer à d'autres analyses "exégétiques" des juridictions du fond.

 

Henri Rius


(1) Cour de cassation, chambre sociale, 9 février 2022, n° 20-17.140 - Cassation de l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 15 mai 2020  RG n° 18/00471.

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